ELLIS ISLAND: Histoire d’une île symbole des États-Unis (1/2)

ellisSituée dans l’ombre de la Statue de la Liberté, Ellis Island fut la porte d’entrée vers les États-Unis pour plus de 12 millions d’immigrants fuyant des conditions de vie difficile en Europe. Leur seul objectif était de vivre le rêve américain et connaître une vie meilleure.

Petit par sa taille mais grande par son histoire, Ellis Island est devenu un lieu primordial de l’histoire américaine. Au fils des années, l’île a connu beaucoup de péripéties et de changements. Nous allons vous raconter son histoire.

1630-1770

Kioshk (ou « l’île des mouettes »), comme la nommait les Amérindiens locaux, a longtemps eu comme seul habitant des oiseaux. Elle fut ensuite prise par les colons Hollandais dans les années 1630 et rebaptisée Oyster Island, en raison de la quantité d’huîtres abondante qu’elle possédait. Au XVIIe siècle, l’île était devenue un repère de pirates. D’ailleurs, un célèbre pirate, Anderson, y a été retrouvé pendu en 1765. Plusieurs autres pirates connaîtront le même sort. C’est pourquoi l’île prit le nom de Gibet Island.

1774-1865

Le 18 novembre 1774, Samuel Ellis achète l’île. Cet écossais, marchand à Manhattan, décida d’acheter l’île pour y construire une taverne pour les pêcheurs. A sa mort, les héritiers de Samuel Ellis ont vendu l’île à l’État de New York en 1808 pour 10 000 $, une somme très importante à l”époque. Plus tard, le gouvernement fédéral y a fait construire des fortifications et une caserne. C’est Charles Vincent, un ingénieur français, qui a été chargé des travaux.

National Archives and Records Administration.
Carte d’Ellis Island et Fort Gibson en 1819 – National Archives and Records Administration

Pendant la guerre contre les britanniques, 13 canons et une garnison de 182 artilleurs étaient présents sur l’île. En 1813, le Gouverneur Tompkins de New York prend le commandement de l’île. Il la nomme Fort Gibson, en hommage au colonel James Gibson qui fut tué lors de la bataille du Fort Erie. A partir de 1835, l’U.S. Navy utilisa l’endroit comme un dépôt de munitions. En 1865, les baraquements sont démantelés et l’armée se retire de l’île. Après des plaintes des habitants de New York quant à la dangerosité des explosifs présents sur l’île, le Congrès adopte un amendement en 1890 pour assainir les lieux.

1880-1907

En 1880, le Congrès américain a affecté 75 000 dollars pour construire le centre fédéral de l’immigration à Ellis Island. L’Immigration Act est adopté par le Congrès en 1891. Le Colonel John B. Weber de Buffalo devient le premier commissaire de l’immigration d’Ellis Island. Un an plus tard, l’île est officiellement ouverte. Annie Moore est la première immigrante à passer les portes du centre. Cette jeune irlandaise de 15 ans débarque sur l’île avec ses deux jeunes frères dans le but de rejoindre leurs parents à New York. Après 12 jours en mer, elle fut accueillie par les officiels qui lui donnèrent une pièce d’or de dix dollars (ce qui équivaut à 250 dollars actuels).

Annie Moore et ses deux petits frères à Ellis Island.
Annie Moore et ses deux petits frères à Ellis Island. (1892)

Bilan du premier jour d’ouverture: 700 immigrants sont passés par Ellis Island. A la fin de la première année: plus de 400 000 immigrés. Cependant un incident va mettre un frein aux arrivées d’immigrants. Le 15 Juin 1897, un incendie dévaste les bâtiments en bois de l’île. Bien que 140 immigrants et de nombreux employés étaient présents sur ​​l’île, on ne dénombre aucun mort. La plupart des dossiers d’immigration datant de 1855 ont toutefois été détruits. De ce fait, le traitement des immigrés est transféré, temporairement, à Barge Office, situé dans le sud de Manhattan à Battery Park. C’est seulement en 1900 que le centre ouvre de nouveau ses portes. Les nouveaux bâtiments en brique rouge ont été dessinés et créés par deux architectes, Edward Lippincott Tilton et William A. Boring. Le projet a coûté environ 1,5 millions de dollars et a été conçu pour traiter le cas de 5000 immigrants par jour.

Les batîments d'Ellis Island avant l'incendie
Les bâtiments d’Ellis Island avant l’incendie – National Archives and Records Administration
The newly built Main Immigration Building c.1904-1910.
Les nouveaux bâtiments (1904-1910) – National Archives and Records Administration

Lors de l’année 1902, Theodore Roosevelt lance une campagne de réforme pour mettre fin aux mauvais traitements infligés aux étrangers et contrer la corruption des agents d’Ellis Island. Cinq ans plus tard, en 1907, l’administration américaine a traité le plus de dossiers, avec 1,25 million d’étrangers examinés. Le 17 avril de cette année-là a vu arriver quinze bateaux avec 11 747 immigrants à bord. Un record!

1917-1932

A son entrée en guerre en 1917, les Etats-Unis font d’Ellis Island un lieu de détention. L’île est utilisée par l’US Navy pour détenir des équipages de navires marchands ennemis (notamment allemands). De même, les présumés ennemis étrangers, résidant sur le territoire américain, y sont arrêtés et détenus. Les hôpitaux de l’île deviennent, quant à eux, des refuges pour les militaires blessés. Durant cette période, l’inspection des immigrants était menée à bord des navires ou sur les quais. Cependant, la guerre entraîna une forte baisse de l’immigration: le nombre de nouveaux arrivants passa de 178 416 en 1915, à seulement 28 867 en 1918.

L’entrée sur le territoire américaine se fait de plus en plus sélective, puisque des critères de sélection apparaissent. En effet, le test d’alphabétisation est introduit à cette époque: les immigrants âgés de plus de 16 ans n’arrivant pas à lire 30 à 40 mots dans leur langue maternelle sont interdits d’entrée. De même, des critères discriminants voient le jour puisque presque tous les immigrants asiatiques ne sont plus admis sur Ellis Island.

caricature
Caricature représentant la mise en place de l’Emergency Quota Act, 1921 – Library of Congress

Adoptée en 1921, l’Emergency Quota Act met fin à la politique d’immigration massive des États-Unis. Elle réduit de façon significative le nombre d’admissions en fixant des quotas par nationalité (elle favorise notamment l’immigration anglo-saxonne). Elle autorise l’admission de 3% de la population de chaque groupe ethnique déjà présent sur le territoire américain (ces dits 3% étaient calculés par rapport au recensement de 1910). Cependant, la loi a créé des ravages sur Ellis Island puisque des milliers d’immigrants furent bloqués, en attente d’expulsion. L’île est devenue tellement surpeuplée que les fonctionnaires ont dû admettre des immigrants en plus des quotas. Côté chiffre, on passe de 900 000 migrants en 1920 à environ 375 000 en 1921.

L’Emergency Quota Act a été remplacée par une loi encore plus restrictive, le National Origins Act. Adoptée en 1924, cette loi restreint l’admission des migrants à 2% de chaque groupe ethnique recensé en 1890. Elle a pour but de diminuer fortement l’accueil des asiatiques (surtout les japonais) et, dans une moindre mesure, les personnes originaires de l’Est et du Sud de l’Europe. De ce fait, le taux d’admissions atteint moins de 150 000 admissions en 1924. Les candidats à l’immigration devaient obtenir un visa dans les consulats américains de leur pays d’origine, avant d’embarquer pour l’Amérique. L’examen médical était alors effectué avant le départ. Quelques années plus tard, en 1929, la Grande Dépression débute aux États-Unis. Pour la première fois, il y a davantage d’immigrants qui quittent le pays que d’immigrants qui arrivent sur le territoire américain.

1939-2014

Lors de la seconde Guerre Mondiale, Ellis Island a principalement servi de centre de détention pour les ennemis étrangers. En 1946, environ 7 000 étrangers ont été détenus sur l’île. Ils étaient principalement allemands, italiens et japonais. Les détenus sont devenus si nombreux que les fonctions de l’immigration ont dû être transférés à Manhattan par manque de place. Durant cette période, l’US Army a formé environ 60 000 militaires sur l’île.

Le 29 Novembre 1954, les activités du site cessent et sont transférées à Manhattan. Les 33 structures d’Ellis Island ferment officiellement leurs portes.

A view of the abandoned Registry Room in the Main Immigration Building.
Le Grand Hall du bâtiment principal abandonné – National Park Service, Statue of Liberty NM

En 1965, le Président Lyndon B. Johnson réunit juridiquement la Statue de la Liberté et Ellis Island par un décret. Il proclame par cette union l’importance de ces deux sites dans l’histoire américaine. Quelques année plus tard, il sera possible de visiter l’île. Les visites guidées restent cependant limitées à l’édifice principal. En 1976, plus de 50 000 personnes visitent l’île.

Dans les années 1980, le Président Ronald Reagan décide de lancer un grand projet de restauration du site qui coûtera 156 million dollars et durera 4 ans. Après avoir été restaurée, l’île est ré-ouverte à la visite en 1990. Le bâtiment central est alors réhabilité pour abriter un musée dédié à l’histoire de l’immigration des États-Unis.

Aujourd’hui, le musée d’Ellis Island reçoit près de 2 millions de visiteurs par an. 40% des américains compte au moins un ancêtre ayant transité par ce lieu.

Une réflexion sur “ELLIS ISLAND: Histoire d’une île symbole des États-Unis (1/2)

  • 13 juillet 2020 à 20 h 14 min
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    J’ai visité Ellis Island. Magnifique, tout est rescencé, on ressent l’histoire de ce grand pays
    et unique qu’est l’Amérique.

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